30km
110m
L’objectif de cette virée en direction du sud-est est clair : aller admirer l’icône urbaine et architecturale que sont les Choux de Créteil ! Pour cela, top départ dans le style art déco au Palais de la Porte Dorée.
L’atmosphère calme et verdoyante du ruisseau de Gravelle, au cœur du bois de Vincennes, constitue la trame de la première portion de la balade qui dévale le coteau et traverse ensuite la Marne pour atterrir dans les quartiers résidentiels de Maisons-Alfort.
Après quelques coups de pédale sur les pistes adossées à l’A86 on déboule à Créteil pour une traversée de part en part de la cité moderne, et un tour de son grand lac artificiel ! C’est la parfaite occasion de joindre l’utile à l’agréable en dégustant son pique-nique face aux grandes réalisations des années 70.
Le chou du spectacle se situe juste après : la trace plonge alors directement dans le secteur des Choux de Créteil. La traversée de ce quartier tout en courbures imaginé par Gérard Grandval est une expérience en soi qui se prolonge par le passage à proximité du Palais de Justice et du siège en forme de pyramide inversée de la société Derichebourg.
Au retour, il suffit de suivre le sens du courant de la Seine en rive droite, avec un finish convivial suggéré à la sympathique place d’Aligre.
Singularités
Passage sur dalle au kilomètre 11.
Avant le départ
- Embarque tes lunettes pour affronter le soleil de Créteil
Au retour
- Pour profiter du marché de la place d’Aligre, il faudra y être avant 14h30
Quelques photos
Points d’intérêts majeurs
L’exposition coloniale internationale de 1931 et le Palais de la Porte Dorée
Le projet d'exposition coloniale est impulsé en France dès 1913, notamment par Henri Brunel, chef de file du « parti colonial » avec l’idée de montrer les bénéfices que rapporte la colonisation à l'économie française. Marseille et Paris se disputent pendant une dizaine d'années le projet. Ce n'est qu'en 1925, pour répondre à la British Empire Exhibition de 1924, que Paris est choisie pour accueillir l’événement. La concurrence entre les deux empires coloniaux fait que les Britanniques refusent de participer à celle de Paris.
La France est alors la seconde puissance coloniale après la Grande-Bretagne. L'Empire français s'étend sur 12,5 millions de km² (soit 22 fois la superficie de la métropole) répartis sur tous les continents et regroupant 65 millions de « sujets français ». Dans le contexte de la crise économique de 1929, le gouvernement cherche par tous les moyens à maintenir la France au rang de grande puissance mondiale.
L’exposition qui en résulte est colossale : dans le bois, autour du lac Daumesnil et le long des maréchaux, on trouve 110 hectares de pavillons à la gloire des colonies françaises et des pays colonisateurs étrangers ainsi que des missions catholiques et protestantes. On y trouve également des reproductions de différents bâtiments : temple principal d'Angkor Vat, mosquées, cases…
L’opposition à l’exposition, et plus largement à l’impérialisme français, s’organise en France autour des dirigeants du PCF, de la CGTU, ainsi que d’artistes comme Louis Aragon, André Breton et René Char, qui s’engagent et nouent des liens avec les contestations des peuples colonisés, liens qui se renforceront jusqu’à la période des luttes de décolonisations.
L’exposition se déroule de mai à novembre 1931 et rassemble 8 millions de curieux. Devant le succès rencontré par le zoo, il est conservé pour devenir le zoo de Vincennes. Au-delà des reproductions architecturales, l’exposition coloniale rassemble également de nombreux "indigènes", exhibés comme figurants et figurantes de leur culture - l’exploitation atteindra le comble de son racisme dans son traitement des Kanaks, transféré.e.s au jardin d’acclimatation, déshumanisé.e.s et présenté.e.s comme des bêtes curieuses “cannibales des mers du Sud”.
Le palais de la Porte-Dorée est construit pour l’exposition, par l’architecte Albert Laprade, dans le style Art Déco. Le bâtiment se présente comme une synthèse de différents styles avec un clin d’œil à l’architecture arabe, car l’architecte a vécu au Maroc. Le bâtiment abrite également un aquarium tropical, toujours visible de nos jours.
Le musée change d’affectation à de multiples reprises, s’éloignant petit à petit des références au colonialisme… Pour finalement être retenu en 2007 pour abriter le musée de l’Histoire de l’immigration. Le musée n’est cependant officiellement inauguré qu’en 2014 par François Hollande.
Pour aller plus loin
https://monument.palais-portedoree.fr/le-contexte-colonial/l-exposition-coloniale-de-1931
https://www.facebook.com/watch/?v=681416716187860
Les archives départementales du Val-de-Marne
Le bâtiment des archives a été conçu par les prolifiques architectes Daniel Badani et Pierre Roux-Dorlut, qui ont souvent oeuvré en duo, et à qui on doit aussi la préfecture et le palais de Justice de Créteil. Leurs bâtiments comptent parmi les plus iconiques de Créteil. A l’époque la presse parle de "modernité confiante" pour décrire leur travail.
Pour les Archives, les études commencent en 1968 et le bâtiment est construit entre 1973 et 1974. Ce projet met en pratique la séparation des fonctions avec un volume bas, affecté aux locaux administratifs et à l’accueil du public, et un volume haut constitué par deux silos destinés aux archives elles-mêmes, en référence au passé agricole de la zone.
Les silos sont habillés de lames métalliques en aluminium coloré suivant un dispositif très innovant pour l’époque appelé LUXALON. Cinq ans après leur confection, ces lames commencent à se détacher… Ce qui entraînera un procès qui ira jusqu’au Conseil d’Etat en 1991 et partagera les torts à part égale entre les concepteurs et les entreprises.
La maison interdépartementale des syndicats
Ce bâtiment a été conçu par l’architecte Jacques Kalisz, très représentatif de sa génération. Arrivé à Paris depuis la Pologne avec sa famille en 1933, Kalisz est en effet confronté à la tragédies du peuple juif en temps de guerre. Son père déporté, il passe la Seconde Guerre Mondiale de manière clandestine dans le Massif Central mais a toutefois l’occasion d’intégrer les Beaux-Arts en 1945.
La période de la reconstruction est faste pour les architectes, et il a l’occasion de fréquenter Paul Chemetov, Jean Deroche, Jean Renaudie ou encore Michel Steinebach au sein des différents ateliers qui le forment. « Futurs architectes ou urbanistes, tous ces jeunes sont issus de la même génération et de milieux populaires, certains sont des fils d’immigrés. Marqués par la guerre et la Résistance, ils partagent des convictions et des goûts communs qui les amènent à se rencontrer et à sympathiser, que ce soit dans leurs écoles respectives ou dans les agences où ils grattent » (Benoît Pouvreau, 2009). En 1963, récemment diplômé, Jacques Kalisz rejoint l’Atelier d’urbanisme et d’architecture – AUA, atelier pluridisciplinaire qui regroupe des architectes, des urbanistes, des paysagistes, des ingénieurs, des plasticiens, etc.
La plupart de ces architectes se revendiquent du mouvement moderne et c’est naturellement vers les élus communistes de la banlieue parisienne qu’ils se tournent au moment de travailler en leur nom propre. Au-delà des sympathies personnelles et politiques, les uns et les autres partagent une vision commune de la ville et de la vie, et les contrats sont bien souvent confiés de gré à gré. Cependant, dès la fin des années 70, des conflits apparaissent au sein des collectifs créés et la montée en puissance de la procédure du concours d’architecture contribue à la raréfaction des projets pour bon nombre d’entre eux.
La maison des syndicats est inaugurée en 1987. C’est une des dernières réalisations de Kalisz. On y retrouve le côté clairement brutaliste de son œuvre mais les matériaux employés sont typiques des années 80/90 : béton, verre et structure métallique géométrique.
Pour aller plus loin
https://journals.openedition.org/insitu/16077
https://www.facebook.com/watch/?v=765977540240438
Les Choux de Créteil
S’il fallait établir un classement des icônes architecturales des années 70 en Ile-de-France l’opération des "Choux de Créteil", grand ensemble réalisé par Gérard Grandval, se retrouverait très certainement bien haut dans la liste. "Emblématiques", "iconiques" ou encore "insolites" sont les qualificatifs fréquemment employés au sujet de ces immeubles uniques en leur genre, édifiés en forme d’œuvre végétale.
Cette série de 10 tours rondes de 14 étages, ainsi que d’une tour annulaire de 6 étages, émerge entre 1969 et 1974 dans un paysage dominé jusque-là par l’agriculture. L’architecte chargé de l’aménagement de ce secteur du nouveau Créteil puise son inspiration dans la souplesse végétale pour imaginer des balcons en forme d’épis de maïs, ou de pétales de fleurs en béton… Mais c’est bien le terme de chou qui va rester attaché à l’ensemble de l’opération. Les balcons en question sont disposés dans l’axe des murs séparant les pièces des appartements et préservent l’intimité des résidents.
Dans une tentative de rompre avec la linéarité et l’orthogonalité des quartiers érigés après-guerre, Gérard Grandval se paye le luxe d’établir le plan-masse du quartier d’après une œuvre de Sonia Delaunay faisant la part belle à la circularité. Vue du ciel le résultat est saisissant ! On s’aperçoit que, des parkings aux cheminements, en passant par le groupe scolaire… Rien n’échappe à la logique du cercle pour constituer ce quartier singulier ayant reçu le label Architecture contemporaine remarquable en 2008.
Aujourd’hui la plupart des "choux" ont été réhabilités, et ce quartier singulier fait encore souvent office de décor pour des films ou des clips.
Pour aller plus loin
https://www.amc-archi.com/article/gerard-grandval-les-choux-de-creteil.55618